La dysphasie ou le trouble primaire de langage est un trouble qui touche la communication. Lorsque l'enfant est jeune, il a souvent de la difficulté à comprendre et se faire comprendre. Lorsqu'il est plus vieux, il a toujours de la difficulté à comprendre (surtout ce qui est abstrait), mais en général, sa parole est claire (pas toujours selon le degré de sévérité). Ses phrases et son discours sont souvent désorganisés. Il a de la difficulté à raconter, expliquer, argumenter, gérer un conflit, etc. En bas âge, les enfants dysphasiques vivent des situations handicapantes, mais comme leur monde présente beaucoup d'images, de dessins et de visuel, ils ont moins de difficultés à s'adapter. Néanmoins, ils vivent souvent des frustrations, car ils ont des difficultés dans une sphère importante de notre société: communiquer.
La communication étant complexe, il est serait très long et laborieux de vous décrire toutes les situations difficiles que peut vivre un enfant dysphasique. Voici des exemples de difficultés que peuvent vivre les jeunes enfants d’âge préscolaire ayant une dysphasie et des idées pour les aider :
- Difficultés à comprendre la tâche: faire une démonstration de ce qu'il faut faire en disant des mots clés.
- Difficultés à comprendre les consignes: répéter, reformuler, donner une consigne à la fois, employer du visuel, des pictogrammes, démontrer ce que l'on veut.
- Difficultés à démarrer une tâche: lui laisser le temps de voir ce que les autres font, le soutenir en lui montrant par où commencer, enlever les objets devant lui dont il n'a pas besoin.
- Difficultés dans les transitions: mettre des pictogrammes qui image l'horaire de la journée et les utiliser lors de chaque transition.
- Difficultés à exprimer ses goûts, besoins et désirs: lui laisser le temps et lui faire comprendre que vous l'écoutez à 100% et vous concentrer sur lui (essayer de ne pas répondre aux autres pendant ce moment), lui demander de vous montrer ce qu'il veut dire, lui poser des questions auxquelles il peut répondre par oui/non et qui vous aideront à cerner ce qu'il veut vous dire.
Après l’âge de 6 ans, leur monde devient de plus en plus verbal et le cursus scolaire, comme nos relations sociales sont basés sur une excellente maîtrise de la langue. Ainsi, ils ont de la difficulté à comprendre ce qu’ils lisent, à suivre les consignes, à débuter des tâches, à réaliser des travaux, à faire des liens. À tort, on croit qu’ils ne sont pas capables d’apprendre ou bien qu’ils sont stupides. Ce tableau peut paraître pessimiste et je suis heureuse si vous lisez ceci et que vous vous dites que votre enfant dysphasique ne vit pas cela. Par contre, pour ceux qui se disent que ce tableau s’apparente à leur enfant, vous devez vous demander comment on peut faire pour leur facilité leur vie.
- Une première chose que nous devons faire est de ne jamais prendre pour acquis qu’ils ont compris. Ne leur demandez pas s’ils ont compris, mais plutôt de vous expliquer ce qu’ils ont compris. Les personnes dysphasiques ne peuvent pas identifier leurs incompréhensions car ils croient avoir compris, mais ils l’ont compris à leur manière. Par exemple, je parle souvent aux parents des mots additions et soustractions. On utilise ces termes fréquemment en classe, pourtant, si on leur demande verbalement de faire une addition, ils seront bloqués. Par contre si on leur met les chiffres avec le signe « plus », ils le feront facilement s’ils sont bons en calcul.
- On entend aussi souvent que les personnes qui présentent une dysphasie ne peuvent pas faire d’inférences. Faux. Ils en font quotidiennement et facilement. Leur difficulté réside non pas dans l’inférence, mais dans le vocabulaire. Si un enfant ne parvient pas à faire une inférence, c’est qu’il y a un mot ou un concept qui est incompris. Il faut donc le plus possible imager les mots qu’ils lisent et activer leurs connaissances avant la lecture du texte. J’ajouterais aussi qu’il arrive fréquemment qu’ils connaissent un mot, mais que hors contexte, ils ne parviennent pas à faire le lien. Par exemple, j’ai rencontré un enfant super il y a quelques semaines et en lui demandant de me définir le mot « atlas », il ne savait que répondre. Sa mère était surprise car il a un atlas sur son bureau dans sa chambre et il l’appelle Atlas. Une fois qu’elle lui a rappelé ce fait, il a très bien donné la définition. On aurait pu aussi lui montrer l’image d’un atlas sur google image (qui est super pour aider dans les devoirs avec les enfants qui ont des incompréhensions).
- Un autre mythe est le fait qu’en mathématiques les personnes qui présentent une dysphasie devraient être bonnes. Tant mieux si les mathématiques vont bien. On s’en réjouit! Par contre, mis à part le calcul, les mathématiques sont sous tendus par le langage. En géométrie, le vocabulaire tel que parallélogramme, hexagone, octogone est ardu. En résolution de problèmes, on utilise une panoplie de termes abstraits (ex: de plus que, en tout, ensemble…). En numération, on utilise « immédiatement, suivant, précédent, enlève, ajoute… ». En logique, l’enfant lit des phrases avec des concepts et doit relier ces concepts entre eux (ex: le coeur est à gauche du carré. Le carré est sous le cercle…). Pour le calcul, il y a moins de termes, mais cela demande un très bon accès lexical et une bonne mémoire de travail qui sont généralement tous les deux défaillants chez les personnes dysphasiques.
Voici quelques trucs généraux pour la classe qui ont plus trait à la flexibilité pédagogique qu’à des adaptations.
- Si l’enfant a de la difficulté à comprendre les consignes, on peut: mettre des mots clés au tableau, donner une information à la fois, répéter et reformuler, s’assurer de sa compréhension en le guidant.
- Si l’enfant a une difficulté d’accès lexical, ceci implique que toute information stockée est plus lente à être retrouvée donc les tables, les inférences, les réponses aux questions qui ne sont pas dans un texte. Il faut donc laisser plus de temps, donner des choix multiples, permettre la calculatrice. Oubliez donc les concours minutés, ils découragent les enfants et leur causent un stress intense.
- Si l’enfant a de la difficulté à écrire des textes, on peut lui faire travailler le texte à l’oral auparavant et ensuite utiliser un plan détaillé.