Voici le troublant témoignage d’une de mes clientes. Elle désire le partager pour sensibiliser le plus grand nombre sur la réalité et les injustices auxquelles font face les parents dans sa situation :
J’ai 33 ans et je suis la maman de deux garçons (3 et 5 ans). Mon aîné est atteint d’un trouble du spectre de l’autisme.
Nous sommes en décembre 2016, en plein congé des Fêtes. La météo nous contraint à rester à l’intérieur, mes deux enfants sont donc constamment en conflit et je cherche une solution qui nous offrira un répit. J’ai une idée ! Pourquoi ne pas aller se promener dans les petites voitures du centre commercial ? Ça ne coûte que quelques dollars pour des minutes de pur bonheur.
Une fois sur place, la demoiselle qui loue les voiturettes m’indique poliment que malheureusement, mon fils de 5 ans dépasse de 2 mm la taille limite. Je lui explique que mon fils est autiste et que s’il n’a pas sa voiture, nous allons vivre l’enfer, car il va courir partout. Elle me propose alors un fauteuil roulant ! Je lui explique que mon fils n’est pas handicapé, mais autiste. Tous les parents qui sont en file derrière moi m’appuient, mais elle clôt le débat en affirmant : « c’est la procédure ». Je prends donc une seule voiture pour mon plus jeune et je me dis qu’ils l’utiliseront à tour de rôle.
La stratégie fonctionne bien et quelques minutes plus tard, nous entrons dans un magasin grande-surface afin que je m’achète une nouvelle tuque. Une fois mon choix fait, nous nous dirigeons tranquillement vers les caisses. Mon plus vieux me dit alors que c’est à son tour d’être dans la voiture et je lui demande d’attendre que nous soyons sortis du magasin. À ce moment, il se met à faire une crise. Il me tape, me pousse, me donne des coups de pied, se jette par terre et hurle à la mort. Tout le monde nous regarde comme si nous étions des extra-terrestres. Personne ne m’offre son aide. Je suis complètement désemparée, j’essaie de reprendre le contrôle, mais avec la foule qui nous entoure je n’y arrive pas. Je décide de prendre mon fils dans mes bras, malgré les coups que je reçois, et je me dirige vers la sortie. Je le dépose juste de l’autre côté des portes, où il n’y a presque personne, et je tente de maîtriser la situation.
À ce moment, deux gardiens de sécurité m’interpellent et me demandent si je n’ai pas oublié de payer mon article.
Je leur explique que je voulais simplement calmer mon fils et que je n’avais aucune intention de voler quoi que ce soit. Mais ils me demandent de les suivre. J’ai le cœur qui débat. Je n’arrive pas à croire ce qui est en train de se passer. Une fois dans leur bureau, ils me lisent mes droits. Je leur explique à nouveau que tout ce que je voulais faire était de reprendre le contrôle sur mon fils qui est autiste. « Nous suivons la procédure », me répondent-ils. Des policiers arrivent alors et me posent des questions sur ce qui s’est passé. Ils sont secs et fouillent mes affaires comme si j’étais une criminelle. Je leur explique ma situation et heureusement, ils finissent par s’adoucir. Ils me disent qu’ils ne procéderont pas à mon arrestation, mais me mentionnent que j’aurais pu laisser l’article dans le magasin avant de sortir. Oui, effectivement, j’aurais pu le faire, mais sur le coup, j’avoue que je n’y ai pas vraiment pensé.
Dire que tout ceci aurait pu être évité si on m’avait écoutée dès le départ, pour me permettre de louer 2 voiturettes…
Cela a pris plusieurs jours avant que je raconte cette histoire à mon entourage. Je me sentais coupable, j’avais profondément honte d’avoir été ainsi interpellée, devant mes garçons, et je ne voulais pas être jugée. Même mes proches ne comprennent pas la réalité de vivre avec un enfant autiste et les reproches sur mes choix de discipline sont fréquents.
Dans les semaines qui ont suivi, j’ai reçu une lettre d’un avocat du magasin. Je devais rembourser les frais pour avoir monopolisé le temps des deux gardiens de sécurité.
Total de la facture : 400 $.
Oui, je l’ai payée. Tout ce que je voulais, c’était de clore cet épisode une bonne fois pour toutes. Je choisis mes batailles.