Le satané monstre jaune!!!

Le satané monstre jaune! J’ai passé l’été au complet à penser à lui. Tous les jours, je le sentais se rapprocher sournoisement. Il n'y a pas une seule journée où je n’ai pas pensé à lui! La phrase qu’on nous répète le plus lorsqu’on devient parent est : profites-en, tu vas voir ça passe tellement vite! Et on ne l’oublie jamais. C’est comme un écho qui nous le répète sans arrêt dans la tête.

Profites-en, profites-en, profites-en!

Je veux bien en profiter, mais il est où le bouton pause? Et pourquoi ça grandit si rapidement des enfants? Tu as à peine trouvé le tour avec le biberon, qu’elle veut manger des céréales! Tu as enfin compris à quelle température elle aime ses céréales et là, elle est rendue à la viande! Tu as eu à peine le temps d’essuyer une larme de joie de la voir faire ses premiers pas, que tu lui répètes déjà 100 fois de ne pas courir dans la maison! En fait, être parent c’est voir la fin de plein de petites histoires avant même de se rendre compte qu’une nouvelle est déjà en train de s’écrire sous nos yeux. Mais pas cette histoire, je la voyais très bien arriver! Je le savais parce qu’elle m’en parlait depuis des années! Elle avait donc hâte de le voir ce fichu monstre. On l’avait souvent croisé dans le passé, et chaque fois elle le regardait avec les yeux pleins d’étoiles et plein d’admiration. Et lui...lui! Je le sentais son regard, sa façon de me regarder qui voulait tout dire : bientôt ce sera son tour! Et l’été a passé, trop rapidement… Profites-en, profites-en, profites-en!!! Ce matin là, la première chose que j’ai vu en ouvrant les yeux c'était une petite fille, debout à côté du lit, déjà toute habillée avec un sourire incroyable. Elle était prête! Vite, vite le bouton pause!!! Il est où ce fichu bouton pause quand on en a besoin!!! Nous avons déjeuné et nous sommes sortis de la maison. Elle et moi, seuls, sur le bord de la rue à l’attendre ce fichu monstre. Il est arrivé, s’est arrêté et a ouvert ses bras. En fait, ses portes… Elle m’a serré avant de monter maladroitement les petites marches de l’autobus, son sac à dos trop gros, sa boîte à lunch, s’est retournée et a vu mes yeux :

Papa! Tout va bien aller ne t’inquiète pas!

Les portes se sont fermées, elle m’a envoyé la main et est disparu avec son monstre qu’elle avait tant hâte de rencontrer. Je peux vous jurer qu’en tournant le coin de la rue je l’ai entendu crier par la fenêtre du bus : Papa, je peux emprunter ta voiture ce weekend?

Profitez-en, profitez-en, PROFITEZ-EN !